Le blog de Madiambal DIAGNE
A quitte ou double

Le gouvernement du Sénégal voudrait inciter la direction du Groupe scolaire Yavuz Selim à demander aux parents d’élèves de ne pas conduire leurs enfants à l’école, à partir de ce lundi 2 octobre 2017. Nous avons refusé d’accéder à une telle demande. Nos salles de classe seront ouvertes comme à l’accoutumée et les enseignants seront à leurs postes. Il sera loisible aux autorités de l’Etat de prendre la responsabilité d’empêcher, par la force publique, des milliers d’enfants sénégalais, de regagner leurs salles de classe et leur priver de manière aussi abrupte de leur droit à l’éducation. L’opinion publique en sera témoin. La Communauté internationale aussi constatera que le gouvernement du Sénégal, qui se propose de développer une initiative pour la promotion de l’éducation, notamment en abritant un Sommet mondial centré sur un partenariat mondial pour l’éducation prévu à Dakar en février 2018, déploie des escouades de policiers devant des établissements scolaires pour empêcher à des jeunes écoliers de suivre des enseignements.

Une telle situation est d’autant plus absurde que l’Etat du Sénégal ne peut pointer du doigt le moindre manquement ou la moindre faute à mettre au passif des responsables des établissements scolaires incriminés. Bien au contraire ! Le Groupe scolaire Yavuz Selim a toujours été présenté par les autorités en charge du système éducatif au Sénégal comme le fleuron de l’éducation, le modèle d’éducation d’excellence. Tous les lauriers et tous les honneurs et hommages ont été rendus par le gouvernement à ce modèle éducatif. Nous en voudrons pour preuve les lettres de félicitations régulièrement envoyées par le président de la République aux responsables de Yavuz Selim pour saluer les excellents résultats engrangés au très sélectif Concours général organisé annuellement par le ministère de l’Education nationale. Aussi, les statistiques des résultats scolaires des élèves de ce groupe scolaire révèlent les meilleures performances, sur l’ensemble du territoire sénégalais. II s’y ajoute que les parents d’élèves continent de manifester une confiance totale à ce groupe scolaire. De nombreux parents d’élèves font d’énormes sacrifices pour pouvoir offrir à leur progéniture la qualité de l’enseignement que délivre le Groupe scolaire Yavuz Selim. C’est dire que cette opération de police est absurde, injuste et on ne peut plus irréfléchie et illégitime. La seule raison évoquée par le gouvernement du Sénégal est que cela se fait à la demande d’un gouvernement étranger. Comment alors le Sénégal peut-il donner une suite favorable à une demande d’un gouvernement étranger, non fondée sur le droit ou une quelconque légalité internationale, et qui sape ainsi les propres intérêts des citoyens sénégalais ? Combien de fois le gouvernement du Sénégal a-t-il réservé une fin de non-recevoir à des demandes formulées par des pays étrangers ? Pourquoi alors cette exception en faveur du régime turc de Recep Tayyip Erdogan ? Qu’est-ce qui motive les autorités de l’Etat du Sénégal pour qu’elles se distinguent de la sorte, alors que tous les pays, auxquels le Sénégal pourrait se mesurer en termes de démocratie, de respect de l’Etat de droit et des principes de gouvernance publique juste, ont refusé ce que leur demande Recep Tayyip Erdogan. Qu’il soit clair pour tout le monde. Le Groupe scolaire Yavuz Selim n’a commis aucune faute et est scrupuleux du respect des lois et règlements dans ce pays. La seule chose que lui reproche le gouvernement du Sénégal est d’être dans le viseur du Président de la Turquie, qui pourchasse jusque dans notre pays des personnes qui sont supposées être ses opposants. La demande de fermeture des écoles proches du Mouvement Hizmet (Servir) de Fethullah Gülen, remonte à l’année 2013. La demande est devenue de plus en plus pressante depuis les événements présentés par le gouvernement turc comme étant une tentative de coup d’Etat en juillet 2016. Qui pourra croire que ce sont de vulgaires et simples enseignants turcs au Sénégal qui auraient participé à préparer et perpétrer un coup d’Etat en Turquie ? Personne n’est dupe. Aussi, personne ne pourra rapporter la preuve d’un lien quelconque, qu’il soit organique ou financier, entre les écoles Yavuz Selim et les auteurs présumés de la fameuse tentative de putsch en Turquie. D’ailleurs, nous avons mis au défi les autorités sénégalaises plus d’une fois sur ce point. De quoi serions-nous donc coupables ?

Le Sénégal viole allègrement ses propres lois

Le Sénégal a choisi de satisfaire les exigences du Président de la Turquie. La Fondation Maarif, créée en mai 2016 par le régime d’Ankara et qui était censée reprendre les écoles, avait annoncé, urbi et orbi, que, le 2 octobre 2017, les écoles lui reviendraient. Franchement, je fais partie de ceux qui refusaient d’y croire. Mais qu’à cela ne tienne ! Seulement, le prix qui sera à payer semble trop élevé eu regard à la violation manifeste des propres lois du Sénégal. Le 7 décembre 2017, le ministre de l’Intérieur du Sénégal avait pris un arrêté portant dissolution de l’association Baskent Egitim, qui avait bénéficié d’une autorisation d’enseigner. La demande de Baskent Egitim avait été formulée en 1997 et l’autorisation d’enseigner lui a été délivrée en 1998. Cette association a exercé, à la satisfaction des parents d’élèves et des autorités en charge de l’Education nationale. La décision de dissolution n’avait été motivée que par le seul moyen qu’«une nouvelle fondation Maarif», avait été créée et devait opérer au Sénégal. Comme s’il n’y avait pas assez de places pour Maarif pour ouvrir de nouvelles écoles et peut-être, faire mieux que Yavuz Selim! La décision du ministre de l’Intérieur a été attaquée devant la Cour suprême du Sénégal en recours pour excès de pouvoir.

En attendant que la haute juridiction ne statue, il conviendra de souligner que depuis plus de deux ans, en 2015, les écoles n’étaient plus tenues par Baskent Egitim, mais par une société anonyme de droit sénégalais, Yavuz Selim. En effet, la société a été créée par acte authentique avec un actionnariat partagé à l’origine entre des citoyens turcs et sénégalais. Yavuz Selim Sa a donc racheté le patrimoine de Baskent Egitim par actes notariés, avant même l’arrêté du 7 décembre 2017 du ministre de l’Intérieur. Aussi, une convention de transfert de gérance avait été passée entre Baskent Egitim et Yavuz Selim Sa. Mieux, depuis le 21 juin 2017, Yavuz Selim Sa a déposé une demande d’autorisation, à son nom propre, pour exploiter l’activité d’enseignement. L’Inspection d’académie de Dakar avait alors indiqué au déclarant responsable, Madiambal Diagne, qu’il n’avait pas besoin de formuler une nouvelle demande, dès l’instant que les écoles existaient déjà et qu’il fallait simplement demander un changement de déclarant responsable. Cela a été fait et il manquait dans le dossier un certificat de nationalité sénégalaise du déclarant responsable. Le dossier a été complété. Il reste aux services du ministère de l’Education nationale de traiter ladite demande. La loi autorise le déclarant responsable à exercer dès l’instant que sa demande a été déposée et le dépôt sanctionné par une attestation de dépôt. Toutes les écoles privées au Sénégal ont fonctionné de la sorte. Yavuz Selim Sa a donc agi de manière strictement conforme à la loi.

Yavuz Selim a tout proposé à l’Etat du Sénégal

Face à la cristallisation de la situation de nos partenaires turcs présents au sein de nos écoles, nous avions estimé devoir chercher une autre solution de sortie de crise. Ainsi, des investisseurs français ont été appelés à la rescousse pour racheter toutes les parts détenues par des citoyens turcs. Les transactions ont été effectuées régulièrement par actes notariés. La société française Horizon Education détient la majorité des parts. Cette initiative n’a pas permis de calmer les ardeurs du gouvernement sénégalais. Le ministre de l’Education nationale en a tiré la conclusion que cette nouvelle transaction compliquerait davantage la volonté du gouvernement de transférer les écoles à la fondation Maarif créée par le gouvernement de Turquie. Ainsi, le ministre Serigne Mbaye Thiam conseillera aux parents d’élèves de retirer leurs enfants des écoles Yavuz Selim et de les inscrire ailleurs. Cette déclaration a eu le mérite de confirmer que la volonté était de fermer l’école plutôt que de continuer cet enseignement de qualité. L’Etat du Sénégal introduira une demande au niveau du Tribunal régional Hors Classe de Dakar pour la désignation de Maarif comme administrateur provisoire des écoles. Le verdict du tribunal est attendu pour le 9 octobre prochain. Le gouvernement a déjà annoncé la couleur, déclarant, par la voix du ministre de l’Education nationale sur les ondes de la Radio Futurs Médias, que même un verdict déboutant l’Etat de sa requête n’empêchera pas la fermeture des écoles.

La direction de Yavuz Selim a déjà eu à saisir le gouvernement du Sénégal pour engager des discussions en vue de trouver des solutions de sortie de crise. La proposition du gouvernement a été d’évaluer la valeur du patrimoine et de le vendre à Maarif. Nous avons refusé une telle proposition, car nous avons estimé que le projet éducatif n’était pas mû par un objectif mercantile et qu’il ne saurait être question de se faire supplanter par Maarif, quel que soit le prix financier que Maarif serait prête à payer.

En revanche, nous avons proposé au gouvernement du Sénégal de céder la totalité des actions à des citoyens sénégalais et donc de demander à tous les Turcs de quitter les écoles ou même de céder gracieusement la totalité des parts au gouvernement du Sénégal, qui ferait ainsi de Yavuz Selim un établissement public. Le gouvernement du Sénégal s’est dit intéressé par cette dernière proposition, qui le mettrait plus à l’aise vis-à-vis du gouvernement de Turquie. Seulement, le gouvernement exige d’abord l’arrêt total des enseignements avant de finaliser tout transfert. Cette dernière exigence ne nous a pas rassurés sur les intentions du gouvernement du Sénégal, qui montre ainsi qu’il demeure toujours dans la logique de donner des gages ou de faire le jeu de Maarif. La société française Horizon Education, actionnaire majoritaire, s’est, dès lors, rétractée. Il n’est plus question de céder quoi que ce soit. Nous restons à exiger le respect scrupuleux de nos droits. Que chacun prenne ses responsabilités devant l’Histoire !

 

Madiambal Diagne
lequotidien.sn

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