Les Emirats Arabes Unis ont livré à la Mauritanie, dans le cadre d’une entraide judiciaire, un responsable de haut niveau du mouvement Al Qaeda. Il s’agit de Mohamed Israeli, ancien combattant en Irak, devenu le Coordonnateur du mouvement de Ben Laden en Afrique du Nord ainsi qu’au Nord Mali. En retraçant son itinéraire, les enquêteurs ont découvert qu’il a séjourné au Sénégal à plusieurs reprises sans attirer l’attention des renseignements sénégalais, sans que l’on ait pu déterminer avec exactitude la raison de ces visites. 

Même si aucun attentat ne s’est jamais produit sur leur sol, les enquêteurs sénégalais surveillent avec appréhension les mouvements de ces curieux jihadistes. Il y a quelques semaines, une dizaines de combattants du mouvement Boko Haram ont été appréhendés, arrêtés ou rapatriés au Sénégal, avec à leur tête le Chef jihadiste Mohamed Ndiaye, Abu Yussuf de son nom de guerre.

La police a vite découvert des liens que ce groupe entretenait avec d’autres « frères » établis au Niger, en Libye et en Syrie. Ils avaient tous des liens avec Moustapha Diatta, chez qui une armada de guerre a été trouvée par les enquêteurs sénégalais.
Ce qui inquiète le plus les autorités sénégalaises, c’est que malgré un dispositif de sécurité renforcé avec l’arrivée de deux drones de surveillance et un dispositif de 2000 membres des forces spéciales le long des frontières, certains points de passage restent poreux et fragiles. Il y a trois mois, un dangereux djihadiste évadé des prisons mauritaniennes a été signalé à Dakar, avant de traverser le pays du Nord au Sud, pour se retrouver à Conakry. Cheikh Ould Saleck a été appréhendé par des voyageurs, qui l’ont arrêté lors de sa tentative de fuite et l'ont livré aux autorités guinéennes.

Quelques semaines après, la collaboration des populations d’un quartier cossu de Dakar a permis l’interpellation de Yacine Ferchichi, un djihadiste présumé tunisien. L’homme avait été condamné à six ans de prison en France, pour des faits liés au terrorisme et fait l’objet d’une condamnation par contumace à 35 ans de prison dans son pays. Il n’en était était pas à son premier séjour dans la capitale sénégalaise. Il cherchait à louer un appartement meublé dans les Almadies, où il voulait s’établir et développer ses affaires, prétendait-il. Le propriétaire lui a réclamé sa pièce d’identité pour l’établissement de son dossier, ce qu’il a refusé de faire, se disant prêt à payer cash six mois d’avance de loyer. Les agents de la DIC, saisis discrètement, ont découvert que l’homme avait en sa possession des faux documents de voyage qui lui ont permis de voyager tranquillement. C’est grâce au fichier d’Interpol et au relevé de ses empreintes génétiques que sa véritable identité a pu être découverte.
La suppression du visa d’entrée au Sénégal a sans doute été une mesure salutaire pour le tourisme sénégalais, mais elle a rendu l’accès au pays plus facile aux quidams du monde entier, qui peuvent après se réfugier dans les pays voisins. La présence des narco trafiquants vénézuéliens et colombiens en Guinée et en Gambie fragilise d’autant plus le Sénégal, déjà menacé par une rébellion dans sa partie Sud. De quoi mettre Police et Gendarmerie sur le pied de guerre.

La présence de jihadistes au Sénégal, jusqu'ici sujet tabou, comment à inquiéter. Il y a une dizaine d'années déjà, des présences étaient signées dans des madrassa à Keur Massar, banlieue lointaine de Dakar et à Mbour, sous la férule d'un grand dignitaire religieux Pulaar. Les musulmans d'une confrérie au centre du pays, les Niassene, entretiennent des relations étroites avec des "frères" musulmans nigérians. Leur leader, Cheikh Ibrahima Niasse dit Baye, y avait séjourné et y compte plus de dix millions de fidèles. De quoi réveiller l'atention des services de renseignement sénégalais, qui veillent notamment sur des couloirs de communications entre les villes. Récemment, un imam de cette confrérie a été emprisonné. Les enquêteurs ont découvert à son domicile des moyens de propagande et la mise en place de réseaux de candidats au Jihad. De quoi alimenter les craintes d'une contamination, même si l'islam confrérique reste un rampart contre l'extrémisme.

ANS