On a beau leur rappeler leurs péchés antérieurs, leur image écornée par la proximité entretenue avec les tenants du pouvoir. Ils auraient commis un sacrilège, celui de s’être acoquinés avec les nouveaux dirigeants après avoir fortement contribué à chasser les anciens du pouvoir. Et enfin de se rebeller contre ceux qui sont là, en s'associant avec ceux qu'ils ont honni hier. Ils sont donc dépeints comme une bande de compères rappeurs opportunistes, ayant trouvé dans la voie de la contestation, un moyen de s’enrichir. La musique nourrit de moins en moins son homme.

Tout ou presque, militait en défaveur des jeunes de Y en a marre qui ont appelé, vendredi 07 avril, à la résistance contre les «excès» (Lu ëppe tuuru) du régime de Macky Sall. 

Au final, il y a bien eu mobilisation. Y en a marre a réussi en un après midi, ce que l’opposition a tenté cinq ans durant sans y parvenir. Manko a certes joué sa partition du jeu, mais le mérite revient amplement aux animateurs du mouvement Y en a marre, qui ont osé lancer le défi de la mobilisation. Ils ont osé défier un régime qui a parfois manifesté des signes de nervosité face aux marches décidées par son opposition. Celle du 7 avril  marque un tournant important dans la lutte de l’opposition. Elle scelle le début d’un pacte entre Manko et une partie de la société civile jugée radicale. Cela a été facilité principalement par deux choses : le ralliement de Me Abdoulaye Wade et du PDS à la cause de Yen a marre et la réaction très inappropriée des responsables du parti au pouvoir, qui ont participé à amplifier cet évènement et à radicaliser une partie de l'opinion.

En effet, l’opportunisme politique manifesté par Me Abdoulaye Wade en apportant son soutien à l’initiative de Y en a marre, a mis fin à une brouille qui dure depuis le 23 juin 2011. Contre Macky Sall, devenu aujourd’hui sa contradiction principale, l’ancien chef d’Etat a aiguisé les armes pour Y en a marre. Ce mouvement qui l’avait tant combattu jusqu’à entraîner sa chute en 2012. Là aussi, certains diront par pur opportusme. Mais n'est-ce pas cela la bonne politique ?

L’autre raison qui a précipité la naissance de cette nouvelle coalition contre Macky Sall, c’est la sortie au vitriol des responsables de l’Alliance pour la République les initiateurs de la manifestation. Le branle-bas noté dans le parti au pouvoir, avec des déclarations tous azimuts des jeunes et des cadres, a donné plus d’envergure au mouvement citoyen et plus d’échos à sa manifestation, comme nous le mentionnons ci-avant.  

Les mêmes réactions sont constatées après la manifestation du vendredi, alors que la meilleure attitude à tenir devait être de tourner la page après avoir tiré les enseignements nécessaires, en saluant un exercice démocratique réussi.

 Pour cela, le président Sall a besoin d’entendre la voix de la sagesse. Il attend présentement de ses collaborateurs qu’ils soient moins agités, afin de lui décrypter le message de la mobilisation du 7 avril et des conséquences qu’il devrait en tirer. Ne serait ce qu’au plan politique. C’est le meilleur service qu’on peut rendre à un chef d’Etat soucieux de terminer les deux ans qui lui restent de son premier mandat, dans un climat apaisé.

B. DIONE