«Le problème de la musique sénégalaise, c’est la sodav»
«Le problème de la musique sénégalaise, c’est la sodav»

«Le problème de la musique sénégalaise, c’est la sodav»

«Le problème de la musique sénégalaise, c’est la sodav»
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Originaires de Kaolack, Papa Amadou Fall et Cheikhou Coulibaly, surnommés les Princes du Folk, forment en 1997 le duo Pape et Cheikh.

Dans un entretien exclusif accordé au groupe Rewmi, ils sont revenus sur leur duo, leur carrière avant de faire des révélations explosives sur la Sodav. Quel est le parcours de Pape et cheikh ? Nous avons commencé à trainer ensemble quand nous étions jeunes. Il y a 10 ans de cela. A l’époque, nous ne faisions pas encore de la musique. On trainait juste entre potes. Nous habitions au Saloum et venions à Dakar pour y passer les vacances scolaires. Après cela, j’ai fait un peu de chorale et c’est là que j’ai appris à chanter ; en plus, avec les jeunes de ma génération, nous aimions tout ce qui était en rapport avec la guitare. C’est là que l’on sait dit pourquoi ne pas apprendre à la faire. Nous sommes partis voir un monsieur pour qu’il nous fasse un crédit pour une guitare. Par chance, il nous l’a accordé. Nous sommes ensuite allés au conservatoire pour apprendre avant de finir par nous spécialiser. C’est après cela que nous avons créé notre premier orchestre. C’était un orchestre sérère. Nous sommes allés dans un village sérère appelé Fimla (Fatick) pour y apprendre la culture sérère. Plus tard, j’ai déménagé à Dakar et cheikh a quitté l’université pour aller à Saly. Dans ce village, je faisais de la couture, du football, de la musique et je jouais dans les hôtels aussi. Mais j’ai préféré la musique au détriment de toutes les autres activités ; c’est à partir de là que nous avons créé le groupe Pape et Cheikh.Vous êtes originaires de Kaolack, que représente cette ville pour vous ? 

 Elle représente tout pour moi. Vu les réalités auxquelles nous faisions face là-bas, il fallait vraiment être un guerrier pour s’en sortir. Quand je parle de réalités, je fais allusion au mode de vie, au brassage culturel. Kaolack est différente des autres villes. On pourrait même dire que c’est comme un village, tout le monde se connaissait. Quand vous vivez ce genre de réalités et que vous voulez vous en sortir ce n’est pas évident, il vous faut beaucoup de sérieux pour réussir. Quel est le secret de la longévité du groupe Pape et cheikh ? Notre relation est devenue plus qu’amicale. Elle est familiale. Dans notre groupe, nous n’avons pas de « mercenaires », nous travaillons tous ensemble depuis de longues années et on partage tout. Le groupe, ce n’est pas seulement Pape et Cheikh mais c’est une histoire de famille d’abord. Ce sont les musiciens qui créent des morceaux et viennent me les proposer pour que je les chante. Chez nous, il n’y a pas d’affaire de star, tout le monde est au même pied et chacun bénéficie du travail. Le secret quand vous travaillez avec des gens, c’est qu’il faut égaliser les parts et c’est ce que nous faisons. Avez-vous déjà eu à vous disputer ? Non ! Nous ne réglons pas les choses comme ça. Avant de faire quoi que ce soit, chacun donne son point de vue et après on se met d’accord sur une chose. Nous prenons le temps qu’il faut pour travailler en cordialité. Qu’est-ce qui explique l’absence de Pape et cheikh sur la scène musicale ? Nous n’avons jamais été absents. (Il insiste). Le seul problème que nous avons, c’est celui de la communication. Pape et Cheikh est le groupe qui joue le plus dans tout le Sénégal. Si on devait évaluer la fréquence de nos prestations, je dirais 60%.

C’est nous qui assurons pour la plupart tous les spectacles lors des diners de gala. Il arrive même qu’on joue deux fois les vendredis et deux fois les Samedis. Pape et Cheikh préfèrent rester dans leur coin et faire leur boulot. Nous avons notre public qui fait partie de « la crème des crèmes », et nous ne nous plaignons pas. Si être présent signifie passer à la télé, à la radio, entre autres alors dans ce cas nous préférons être absents.« Avec la SODAV nous sommes payés qu’une seule fois dans l’année, et le pire nous ne savons même pas quand…». Avez-vous quelque chose à dénoncer dans la musique sénégalaise ? La musique sénégalaise est mal gérée par la SODAV et c’est une chose que je dénoncerai toujours. Avant la SODAV, il y avait le BSDA.

Avec ce dernier, nous avions la possibilité de percevoir de l’argent au moins jusqu’à trois fois l’année. Par contre, la SODAV quand elle fut créée, il a été dit qu’il y aurait une nette amélioration. Ce qui avait redonné de l’espoir à plusieurs d’entre nous. Depuis que la SODAV est là, nous ne sommes payés qu’une seule fois dans l’année. Et le pire, c’est que nous ne savons même pas quand. Cela fait 4 ans qu’elle est là et c’est seulement maintenant que nous avons les cartes de membres. La première fois que nous avions dénoncé la mauvaise gestion de la SODAV, nous avons eu des problèmes avec certains musiciens et même avec le ministre. Quelques mois après, ce dernier s’est rendu sur les lieux pour leur parler de leur mauvaise gestion. Je ne comprends pas comment on peut prendre l’argent d’autrui et le repartir comme bon te semble. Le problème de la musique sénégalaise, c’est la SODAV sur un milliard, tu prends les 700 millions et tu en fais ce que tu veux pour ensuite demander aux propriétaires de se taire. Le président a remis un milliard aux artistes pour leur aide face à la covid-19, sauf que nous n’avons pas confiance à la SODAV pour la répartition de cet argent. Nous, les artistes, nous voulons que la répartition soit équitable. Ce que nous voulons, c’est que la structure nous remette la liste des ayants droits pour que l’on sache qui est qui et qui doit bénéficier de cette aide. Cette structure doit être en mesure de savoir combien nous sommes au total. Nous les musiciens, nous nous connaissons tous .Si après on vient nous dire que nous sommes au Sénégal 9000 musiciens au total, je dirais que cela n’est pas vrai. Ça n’existe pas. Le problème de la musique sénégalaise, c’est en fait la SODAV. Vos relations avec la Sodav sont-elles normalisées ?

Non ! Elles ne seront jamais normales tant qu’ils seront encore là. Quand la SODAV a fait son bilan de l’année 2019, elle a collecté 800 millions et elle a pris les 500 millions pour son propre compte afin de financer ses activités. C’est un problème interne. Par conséquent, je demande un audit de la SODAV.Combien gagnez-vous avec vos droits d’auteurs ? Avec la Sodav concrètement combien d’argent avez-vous amassé ? C’est une chose que je ne révèlerai pas. Mais tout ce que je peux dire, c’est que je gagne mieux que certains artistes, mais le combat n’est pas à ce niveau. Le combat, c’est de me battre pour ma famille, pour que quand je ne serai plus de ce monde, ils puissent continuer à percevoir mon argent au niveau de la SODAV. Et pour cela, il faut que je leur laisse des papiers qui le prouvent. Votre identité musicale purement folk ne vous handicape-t-elle pas ?

Si c’était à recommencer, nous aurions encore choisi le folk. La particularité de cette musique, c’est qu’elle donne toujours un message. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire de tout et de chanter de tout. Concernant nos chansons, nous faisons des choses qui peuvent être utiles pour les autres. Après tout, chacun ne fait que ce qu’il peut. Nous faisons le folk parce que c’est ce que nous savons faire, c’est ce que nous avons appris et aucune autre musique ne peut nous influencer. Par contre, nous pouvons écouter d’autres musiques, solliciter d’autres musiciens en cas de besoin. Notre musique à nous, c’est le folk, elle représente notre identité. C’est grâce au folk que nous avons eu tout ce que nous avons aujourd’hui. Vivez-vous très bien de votre musique ? Nous rendons grâce à Dieu. Grâce à la musique, nous avons pu avoir notre maison, nous y avons fondé notre famille et rien que pour ça, rendons grâce. Nous avons déjà rempli notre part du contrat. Ce qui reste maintenant, c’est de préparer notre famille en les encadrant… Et avec la SODAV, nous ne pouvons pas faire cela parce que l’argent que nous devons récolter, c’est elle qui le bouffe. Contrairement au BSDA où en dehors des 2 ou 3 fois ou je percevais mon argent chez eux, je percevais aussi au niveau de la SACEM.

Mais depuis que la SODAV est là, il n’y a plus rien de tout ça. Le problème des artistes du Sénégal, c’est elle. Je le dis haut et fort. N’avez-vous pas de regrets par rapport à la musique? J’ai beaucoup de regrets. Il arrive des fois où je ne suis pas compris. La vie est faite de combats et il y a toujours des hauts et des bas. Comment présagez-vous l’avenir de la musique sénégalaise ? Elle ne sera pas facile parce que les choses ont changé. Nous sommes à l’époque du numérique. Il faut changer beaucoup de choses, revoir notre communication et notre façon de faire. Chacun peut être star même en restant chez lui. Quels sont les critères de recrutement d’un musicien chez Pape et Cheikh ? Tout le monde est libre de venir. A condition de ne ni fumer, ni boire. Nous collaborons avec tout le monde.







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