L’intégralité du rapport accablant de l’IGE sur le contrat de PETRO-TIM
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L’intégralité du rapport accablant de l’IGE sur le contrat de PETRO-TIM

L’intégralité du rapport accablant de l’IGE sur le contrat de PETRO-TIM
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On en sait un peu plus sur l’enquête de l’Inspection générale d’Etat(IGE) concernant la société Petro-Tim et qui, jusque-là, était classé confidentielle. Dans un rapport obtenu par votre site guestuinfo, l’IGE avait clairement déconseillé le président de la République, de signer le contrat d’exploration pour Petro-Tim qui, selon les enquêteurs n’a aucune expérience dans le domaine du pétrole.

Voici l’intégralité du document.

RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE

EXEMPLAIRE No

INSPECTION GENERALE DÉTAT

RAPPORT N°94/2012

DENQUÊTE A LA SOCIÉTÉ DES PÉTROLES DU SÉNÉGAL (PETROSEN) RELATIVE A LA DENONCIATION DE LA SOCIETE

TULLOW OIL SENEGAL

SECRET Toute personne qui détient ce document sans avoir qualité pour le connaître tombe sous le coup des lois et décrets sur les crimes et délits contre la sûreté de l’état

10 Octobre 2012

SOMMAIRE

INTRODUCTION..

OC.

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|- SITUATION ADMINISTRATIVE ET JURIDIQUE DE PETROSEN : STATUTS, MISSIONS ET OBJECTIFS.

……....…. 7

11 – COMPETENCE RESPECTIVE DU MINISTERE EN CHARGE DU

SECTEUR PETROLIER ET DE LA SOCIETE D’ETAT EN MATIERE DE DELIVRANCE DE PERMIS DE RECHERCHE ET DE PARTAGE

D’HYDROCARBURES..

iR

………………9

….

iiiiii

11-1 Présentation et traitement de la demande de permis de recherche d’hydrocarbures …….

……..…… 11 Il-3 Constatations, observations et propositions ……………

111 – FAITS DENONCES PAR TULLOW OIL SENEGAL………….. III-1 Sur l’octroi d’un permis de recherche et de partage d’hydrocarbures sur les blocs de Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond à Pétro Tim Limited alors que ces blocs étaient l’objet de négociation très avancée avec Tullow Oil : ….

…………….. 22 III-1-1 Les faits ….. III-1-2 Les griefs reprochés à PETROSEN. III-1-3 Justifications données par PETROSEN …...

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III-1-4 Les observations et commentaires des enquêteurs

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…....…….. 25 III-2 Sur le versement dans le compte de PETROSEN de

pénalités dues à l’Etat du Sénégal ………….

111-2-1 Faits

…………

……………

III-2-2 Les griefs reprochés à PETROSEN ….

III-2-3 Justifications données par PETROSEN ……..……....

111-2-4 Observations et commentaires des enquêteurs :.. 33

……………..

. 1

0

DD

0

0

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1

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0

111-3 Sur la demande de paiement de bonus de signature formulée par le Directeur de PETROSEN :.

111.3.1 Les faits ….....

………………………. 37 II-3-2 Les griefs contre PETROSEN……….....………….. 38 III-3-3 Les justifications données par PETROSEN …………. III-3-4 Observations et commentaires des enquêteurs …. 39 IV – CONCLUSIONS DES ENQUETEURS. IV-1 Les manquements constatés : ………. IV-2 Sur les propositions …….

……….

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3

INTRODUCTION

Par ordre de mission n°035/PR/CAB/IGE du 30 mai 2012 (annexel), nous, Gallo SAMBE et Oumar SARR, Inspecteurs généraux d’Etat, avons été chargés d’une enquête auprès de la Société des Pétroles du Sénégal (PETROSEN).

Un dossier de base lié à l’ordre de mission a été remis à cette fin. Il comprend :

• une lettre du 02 mai 2012 signée par Madame Awa NDONGO, représentante de Tullow Oil Sénégal Limited à Dakar (annexe 2);

copie

de

la

la

lettre n°000000628/MICITIE/MDE/DHCD/ant du 10 février 2012 du Ministre d’Etat, Ministre de la Coopération internationale, du Transport aérien, des Infrastructures et de l’Energie notifiant à Tullow Oil le retrait du permis relatif au Saint Louis Offshore peu profond et ordonnant le versement dans le compte bancaire de PETROSEN de l’indemnité compensatrice des travaux prévus à la convention et non exécutés (annexe 3);

• la copie d’un message électronique daté du 19 janvier

2012 et signé Ibrahima MBODJI, Directeur général de PETROSEN; réclamant un bonus de signature (annexe 4);

• la copie de l’ordre de virement de la somme de Trois millions (3.000.000) de dollars dans le compte bancaire de PETROSEN (annexe 5).

Il ressort de ces documents que les faits dénoncés par Tullow Oil Sénégal Limited, portent essentiellement sur :

• la conclusion de la convention de recherche et de

partage d’hydrocarbures relatifs aux blocs de Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond avec Petro Tim Limited alors que les mêmes blocs font l’objet de négociations entre PETROSEN et Tullow Oil Sénégal Limited; la sollicitation, le 19 janvier 2012, à Tullow Oil, d’un million cinq cent mille (1.500.000) dollars US par bloc sollicité, à titre de bonus de signature, alors que les blocs concernés ont été, à la date du 07 janvier 2012, attribués

à la société PETRO TIM LIMITED;

• le versement sur instruction du ministre en charge du

secteur pétrolier de la somme de Trois millions (3.000.000) de dollars US dans le compte bancaire de PETROSEN, ouvert dans les livres de la SGBS Paris, en compensation des travaux prévus à la convention de recherche pétrolière signée avec l’Etat et non réalisés ;

L’examen de ces faits implique de vérifier :

1. les conditions d’octroi à Pétro Tim Limited des permis de

recherche et de partage de production d’hydrocarbures relatifs aux blocs de Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond;

2. l’usage qu’a fait PETROSEN des Trois millions (3 000 000)

de dollars versés dans son compte bancaire au nom de l’Etat du Sénégal;

3. la régularité de la demande de paiement de bonus de

signature.

Le présent rapport, qui rend compte des investigations menées à cet effet ainsi que des conclusions auxquelles elles

ont abouties, expose :

1. les missions et objectifs assignés à PETROSEN ainsi que

sa situation administrative et juridique ; 2. les compétences respectives de PETROSEN et du

Ministère en charge du secteur pétrolier en matière de délivrance de permis de recherche et de partage de

production d’hydrocarbures; 3. les éléments réunis sur les faits dénoncés par Tullow Oil

Sénégal ainsi que les observations et commentaires formulés par les enquêteurs.

1- SITUATION ADMINISTRATIVE ET JURIDIQUE DE PETROSEN : STATUTS, MISSIONS ET OBJECTIFS

PETROSEN est une société commerciale dont le capital social est détenu à 99% par l’Etat du Sénégal et, à raison de 01%, par la Société nationale de Recouvrement (SNR).

Ce qui autorise, au sens de la loi n°90-07 du 26 juin 1990 relative à l’organisation et au contrôle des entreprises du secteur parapublique et au contrôle des personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique (annexe 6), à qualifier PETROSEN de société nationale. En effet, au sens de la loi, est société nationale toute société par actions dont le capital est intégralement souscrit par l’Etat et/ou d’autres personnes publiques.

PETROSEN est constituée sous forme de société anonyme. PETROSEN est dirigée par un conseil d’administration et une direction générale. Il y a une dissociation entre le président du conseil d’administration et le directeur général. La répartition des pouvoirs entre le président du conseil d’administration et le directeur général est faite en application des dispositions de l’Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés et du Groupement d’intérêt économique et des dispositions non contraires de la loi n°90-07 précitée.

PETROSEN a pour objet les activités de prospection, de recherche, d’évaluation, de développement, de production, de transport ou de commercialisation des hydrocarbures, y compris le traitement du gaz naturel.

A cet effet, elle est chargée :

1.d’assurer la promotion du bassin sédimentaire

sénégalais; 2.d’entreprendre des activités de prospection, de

recherche, d’exploitation, de transport et de commercialisation des hydrocarbures liquides et gazeux à l’état brut, seule ou conjointement avec toute autre société, filiale ou non, dans le cadre d’association ou

toute forme de groupement; 3.d’assurer toutes activités similaires ou connexes,

notamment :

(

• l’importation du pétrole brut et/ou produits

dérivés ;

• le raffinage des hydrocarbures par la réalisation

d’unités nouvelles et/ou la prise de participation

dans des unités existantes;

• la production, le stockage, la commercialisation et

la distribution de tous produits pétroliers bruts, semi-finis ou finis, directement ou par création de filiales et/ou la prise de participation dans les

sociétés de distribution d’hydrocarbures ou produits dérivés ; le transport des produits pétroliers bruts, semi-finis ou finis et de tout produit dérivé.

Par ailleurs, en vertu des dispositions de l’article 6 b) de la loi n°98-05 du 08 janvier 1998 portant Code pétrolier (annexe 7), en sa qualité de société d’Etat, agissant au nom et pour le compte de l’Etat, PETROSEN peut négocier et conduire directement un contrat minier d’hydrocarbures avec un ou des demandeurs dont la demande est jugée recevable par le Ministre en charge du secteur pétrolier.

Il résulte de ce qui précède qu’en matière d’opérations pétrolières, notamment d’établissement de convention de recherche d’hydrocarbures que l’Etat est représenté par le Ministre en charge du secteur pétrolier et la société d’Etat qui ont chacun des compétences différentes qu’il va falloir examiner.

II COMPETENCE RESPECTIVE DU MINISTERE EN CHARGE DU SECTEUR PETROLIER ET DE LA SOCIETE DETAT EN MATIERE DE PERMIS DE RECHERCHE ET DE PARTAGE

DHYDROCARBURES

La loi n°98-05 précitée, en son article 6, confère à l’Etat la possibilité d’entreprendre soit directement, soit par l’intermédiaire de sociétés d’Etat agissant seules ou en

association avec des tiers, soit par l’intermédiaire d’une seule ou plusieurs personnes physiques ou morales de son choix, de nationalité sénégalaise ou étrangère, des activités de prospection, de recherche, d’évaluation, de développement, de production, de transport ou de commercialisation des hydrocarbures, y compris le traitement du gaz naturel.

Le régime juridique auquel ces activités peuvent être soumises est :

• soit l’autorisation de prospection ;

• soit le permis de recherche d’hydrocarbures;

• soit la concession d’exploitation d’hydrocarbures.

Dans le présent rapport, il ne sera question que du permis de recherche d’hydrocarbures.

Le permis de recherche et de partage d’hydrocarbures est un titre minier octroyé par l’Etat. Il confère à son titulaire, dans les limites d’un périmètre déterminé, le droit exclusif d’exécuter tous travaux, y compris le forage ayant pour objet la recherche et la mise en évidence de gisements d’hydrocarbures, conformément aux stipulations de la convention attachée audit permis.

L’octroi du permis de recherche est du ressort de l’Etat. La demande est introduite soit auprès du Ministre en charge du

secteur pétrolier, soit auprès de la société d’Etat, selon que l’Etat a décidé d’entreprendre directement par lui-même des opérations pétrolières ou qu’il a décidé d’agir par l’intermédiaire d’une telle société.

111 Présentation et traitement de la demande de permis de recherche dhydrocarbures :

Lorsque lÉtat se réserve le droit dentreprendre

directement pour son compte des opérations pétrolières, le Ministre chargé du secteur des opérations pétrolières est, conformément aux dispositions de l’article 6 du Code pétrolier, compétent pour recevoir les demandes de permis de recherche et de partage d’hydrocarbures.

S’il décide d’accepter de recevoir une demande de permis de recherche d’hydrocarbures ou de contrats de services, une convention est négociée entre lui et le ou les demandeurs.

Si la négociation aboutit, la convention est signée conjointement par le Ministre et le représentant légal du ou des demandeurs, après avis conforme du Ministre en charge des finances.

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La convention fera alors l’objet d’enregistrement dans les conditions prévues par la réglementation.

Lorsque lÉtat se réserve le droit dentreprendre les

recherches par lintermédiaire dune société dEtat, les demandes de contrat de services sont adressées en cinq (5) exemplaires à celle-ci qui en transmet trois (3) à l’administration chargée du suivi des opérations pétrolières pour inscription au registre spécial des hydrocarbures.

La convention est signée par la société d’Etat et le ou les demandeurs, puis elle est contresignée par le Ministre chargé du secteur pétrolier, après avis conforme du Ministre chargé des finances. La convention est ensuite soumise à l’approbation du Président de la République. Le décret et la convention sont publiés au Journal Officiel.

Avec la création de PETROSEN, comme société d’Etat chargée des opérations pétrolières, il incombe à celle-ci de recevoir les demandes de permis de recherche et

d’effectuer les formalités requises, à savoir saisir :

✓ d’une part, l’administration chargée du suivi des

opérations pétrolières pour inscription de la demande au registre spécial des hydrocarbures;

✓ d’autre part, le Ministre chargé du secteur

pétrolier pour qu’il statue sur la recevabilité de la demande.

Lorsque le Ministre déclare recevable la demande, il invite le ou les demandeurs à se rapprocher de PETROSEN pour négociation.

Que l’Etat décide d’entreprendre directement pour son compte ou qu’il se réserve le droit d’entreprendre des opérations pétrolières par l’intermédiaire d’une société d’Etat, le processus est immuable et obéit aux formalités qui suivent.

. Les étapes de la procédure :

Les étapes de la procédure définies par la réglementation en vigueur sont les suivantes :

– l’inscription de la demande au registre spécial des

hydrocarbures; – l’examen de la recevabilité de la demande; – la négociation; – la signature de la convention ou du contrat de

service; l’approbation de la convention ou du contrat de service par le président de la République ;

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– la publication du décret et du contrat de service au

journal officiel

II-2 L’inscription de la demande au registre spécial des hydrocarbures :

L’inscription de la demande est une formalité prescrite par le décret n°98-810 du 06 octobre 1998 (annexe 8), qui en son article 4, fixe les modalités et conditions d’application de la loi n°98-05 portant Code pétrolier. L’administration chargée du secteur des opérations pétrolières ouvre un registre spécial des hydrocarbures, tenu à jour; y sont répertoriés et datés toutes les demandes, octrois, résiliations ou autres éléments concernant les titres miniers d’hydrocarbures et les contrats de services.

Sont annexées à ce registre les cartes géographiques au 1/100 000e ou 1/200 000€. Y sont également indiqués, et modifiés quand il y a lieu, les périmètres des zones objet des autorisations de prospection, des permis de recherche et des concessions d’exploitation relatifs aux contrats de services, et le cas échéant, la délimitation des zones interdites aux opérations pétrolières.

La tenue du registre et l’enregistrement des demandes, décisions d’octroi, de résiliations ou tous autres éléments concernant les titres miniers d’hydrocarbures, incombent,

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sous la responsabilité du Ministre chargé du secteur pétrolier, à l’administration chargée des opérations pétrolières, en l’occurrence la Direction des Hydrocarbures.

Il3 Constatations, observations et propositions :

Une vérification menée auprès de cette administration, nous a permis de constater que :

• le registre existe, mais il n’est ni côté ni paraphé et ni

tenu à jour. Toutes les demandes concernant les titres miniers d’hydrocarbures et les contrats de services n’y

sont pas répertoriées ;

• en lieu et place, la Direction des Hydrocarbures a

élaboré un tableau de bord des activités d’exploitation d’hydrocarbures. Mais ce tableau de bord ne répertorie que les titres miniers d’hydrocarbures définitivement attribués, c’est-à-dire approuvés et publiés.

Interpellé sur ces constatations(annexe 9), le Directeur des Hydrocarbures a affirmé avoir, à plusieurs reprises, attiré, sans succès, l’attention de ses supérieurs sur la nécessité de se conformer aux prescriptions réglementaires en mettant à sa disposition des registres spécialement confectionnés à cet effet. Il a soutenu la

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mise en place, par ses soins, d’un tableau de bord des

activités d’exploitation d’hydrocarbures.

Sur ce point, les enquêteurs sont d’avis que la mise en place d’un tableau de bord des activités d’exploitation des hydrocarbures est une excellente initiative qui mérite d’être encouragée et poursuivie.

Mais, en tout état de cause, elle ne saurait remplacer la tenue d’un registre spécial des hydrocarbures qui constitue une exigence légale.

En effet, le registre ouvert par la Direction des Hydrocarbures, qui n’est pas tenu à jour et qui, par ailleurs, n’est ni côté ni paraphé, n’assure ni la disponibilité des informations sur les demandes de titres miniers d’hydrocarbures et leur gestion, ni la transparence des procédures de délivrance des permis de recherche d’hydrocarbures.

Le registre en cours ne satisfait pas aux exigences réglementaires en termes de mentions. Toutes les demandes reçues par les services compétents n’y sont pas inscrites.

L’irrégularité ci-dessus relevée ne garantit pas la transparence des procédures d’octroi des titres miniers

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d’hydrocarbures. En effet, le fait qu’il n’ait pas été tenu à jour, il ne permet pas de disposer d’informations complètes et fiables sur les demandes et la suite qui leur a été réservée. Pour preuve, la manifestation d’intérêt relative aux blocs sédimentaires de Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond, introduite par Pétro Tim n’y est pas répertoriée.

Cette situation est caractéristique d’un dysfonctionnement du service public chargé de la collecte des informations relatives aux titres miniers d’hydrocarbures, auquel il convient de remédier rapidement pour assurer l’efficacité du système de collecte des informations relatives aux titres miniers d’hydrocarbures et la transparence des procédures.

PROPOSITION

Ministre en charge du secteur pétrolier

Mettre en place le registre spécial des hydrocarbures côté et paraphé par luimême et le faire tenir par le Directeur des Hydrocarbures conformément aux dispositions de la loi.

a) La recevabilité de la demande :

Aux termes de l’article 10 du Code pétrolier, après avoir fait compléter, le cas échéant, la demande, le ministre fait connaître aux requérants si leur demande est recevable ou non.

Pour être recevable, la ou les demandes doivent être présentées dans les forme et conditions fixées par le décret n°98-810 du 06 Octobre 1998 fixant les modalités et conditions d’application de la loi n°98-05 du 08 janvier 1998 portant Code pétrolier, et porter exclusivement sur des surfaces disponibles à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures.

En cas de demandes concurrentes, aucun droit de priorité ne peut être invoqué.

Lorsque le Ministre accepte la demande, la convention est négociée selon les modalités fixées par décret.

b) La négociation :

Lorsque l’Etat se réserve le droit d’entreprendre par l’intermédiaire de la société d’Etat les opérations de recherche pétrolière, les négociations sont conduites par celle-ci pour le compte de l’Etat.

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A cet effet, l’Etat a créé une société d’Etat dénommé PETROSEN. Cette dernière est chargée des opérations pétrolières. A ce titre, il revient donc à PETROSEN de conduire les négociations pour le compte de l’Etat avec le ou les demandeurs suivant les modalités fixées par le décret n°98 810 précité.

Aux termes de l’article 14 du décret, la demande de permis de recherche d’hydrocarbures est adressée en cinq (5) exemplaires à la société d’Etat, en l’occurrence PETROSEN, qui en transmet trois (3) à l’administration chargée du suivi des opérations pétrolières pour inscription au registre spécial des hydrocarbures et saisit le Ministre chargé du secteur pétrolier pour qu’il statue sur la recevabilité de la demande.

Lorsque le Ministre déclare recevable la demande, il invite le ou les demandeurs à se rapprocher de PETROSEN pour entamer les négociations. Celle-ci conduit les négociations et, en cas d’accord, signe une convention avec le ou les demandeurs, puis la soumet au contreseing du Ministre.

c) La signature de la convention :

La convention signée par PETROSEN et par le ou les demandeurs est contresignée par le Ministre en charge du secteur pétrolier, après avis conforme du Ministre de

l’Economie et des Finances. L’avis est réputé conforme si, à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la demande d’avis, aucune suite n’est donnée à ladite demande.

La convention est alors soumise à approbation du Président de la République.

d) Approbation de la convention par le président de la

République :

Après avis requis du Ministre en charge des finances, le Ministre responsable de la conclusion de la convention soumet celle-ci à l’approbation du Président de la République.

La Convention est approuvée par décret.

e) Publication du contrat et du décret dapprobation au

Journal Officiel :

Ensemble, la convention et le décret sont publiés au Journal Officiel. La convention fait également objet d’inscription au registre spécial des hydrocarbures tenu par la Direction des Opérations d’Hydrocarbures.

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Après accomplissement de ces formalités et notification de la Convention, le titulaire du permis est tenu de mettre en place une caution de bonne exécution.

Le permis accordé à Petro Tim Limited a-t-il respecté la procédure ci-dessus décrite et les formalités requises à cet effet ?

Dans sa lettre du 02 Mai 2012 (annexe 2), adressée au Ministre de l’Energie en charge du secteur pétrolier, Tullow Sénégal Limited a soutenu la procédure d’attribution des permis de recherche d’hydrocarbures à Petro Tim irrégulière.

III – FAITS DENONCES PAR TULLOW OIL SENEGAL

Dans la lettre du 02 mai 2012, Madame Awa NDONGO, représentante de Tullow Sénégal Limited, a dénoncé au Ministre de l’Energie en charge du secteur pétrolier, la convention de recherche et de partage d’hydrocarbures passée avec la société Petro Tim Limited. Elle a estimé ladite convention suspecte et irrégulière.

Elle a soutenu que les blocs attribués à Petro Tim faisaient l’objet de négociation entre sa société et PETROSEN ; que les négociations étaient tellement avancées, que les dirigeants de Tullow Oil plc, société mère de Tullow Sénégal Limited, ont effectué des déplacements à Dakar.

Elle a également affirmé avoir reçu du Directeur général de PETROSEN la demande de paiement d’un million cinq cent (1 500 000) dollars US par bloc sollicité, à titre de bonus de signature. Mais à sa surprise, elle a appris que les blocs concernés ont été attribués à Petro Tim Limited, avant même que la demande de paiement de bonus de signature eût été formulée ; ce que n’ignorait sûrement pas le Directeur de PETROSEN.

Par ailleurs, elle a soutenu, se prévalant de la lettre n°00000628/MICITIE/DHCD/ant du 10 Février 2012, que sur demande expresse de M. Karim WADE, Ministre d’Etat, Ministre chargé du secteur pétrolier, Tullow Oil plc a versé dans le compte de PETROSEN la somme de Trois millions (3 000 000) de dollars US, en compensation des travaux prévus par la convention de recherche et de partage d’hydrocarbures, relative au bloc de Saint Louis Offshore peu profond, qui n’ont pas été réalisés.

III-1 SUR LA DELIVRANCE DE PERMIS DE RECHERCHE ET DE PARTAGE DHYDROCARBURES SUR LES BLOCS DE SAINT LOUIS OFFSHORE PROFOND ET CAYAR OFFSHORE PROFOND A PETRO TIM LIMITED ALORS QUE CES BLOCS ETAIENT L’OBJET DE NEGOCIATIONS TRES AVANCES AVEC TULLOW OIL:

III-1-1 Les faits : par lettre datée du 03 Octobre 2011, adressée au Ministre de la Coopération internationale

(annexe9), du Transport aérien, des Infrastructures et de l’Energie, Monsieur Wong Joon Kwang, agissant au nom et pour le compte de Petro Tim Limited a manifesté son intérêt pour les blocs de Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond.

Par lettre n°0000297/MICITIE/CAB/SP/ef du 10 Octobre 2011, estampillée confidentielle (annexe 10), Monsieur Karim WADE, Ministre d’Etat, Ministre de la Coopération internationale, du Transport aérien, des Infrastructures et de l’Energie a transmis au Directeur de PETROSEN copie de la manifestation d’intérêt de Petro Tim pour Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond. Il a instruit le Directeur de PETROSEN de prendre contact avec les représentants de Petro Tim « afin d’étudier plus en détails leur proposition et discuter des modalités de délivrance éventuelle de permis de recherche » relatif aux blocs sollicités.

En exécution des instructions reçues, par lettre n°0000003/DG/msf du 14 Octobre 2011 (annexe11), Monsieur Ibrahima MBODJ, Directeur général de PETROSEN a invité le représentant de Pétro Tim, Monsieur Wong Joon Kwang, à se présenter à Dakar, au siège de PETROSEN, pour des discussions formelles.

Par lettre du 16 avril 2012 (annexe 12), Monsieur Kwang a exprimé à Monsieur Ibrahima MBODJ sa satisfaction d’avoir

conclu avec PETROSEN un contrat relatif aux blocs sollicités et a promis de mettre rapidement en place les procédures et équipements nécessaires ainsi que le personnel requis.

III12 Les griefs formulés contre PETROSEN : Tullow Oil a reproché à PETROSEN le fait de lui avoir réclamé, à la date du 19 janvier 2012, le versement d’un million cinq cent mille (1500000) dollars US par bloc alors qu’à la date du 07 janvier 2012, elle a conclu avec Petro Tim et a fait contresigner par le ministre en charge du secteur pétrolier des conventions de recherche et de partage d’hydrocarbures portant sur les mêmes blocs.

Elle a affirmé que la conclusion rapide des conventions signées avec Petro Tim défie toutes les procédures et pratiques connues en matière de négociations portant sur des conventions relatives aux opérations pétrolières.

Tullow s’est, par ailleurs, désolée que les négociations entamées avec PETROSEN, très avancées, n’aient pas été prises en compte.

III13 Justifications données par PETROSEN : Lors de son audition au siège de l’Inspection générale d’Etat, le Directeur de PETROSEN a soutenu avoir reçu de Monsieur Karim WADE, Ministre d’Etat, Ministre de la Coopération internationale, du Transport aérien, des Infrastructures et de l’Energie, des instructions fermes et précises dans le sens de présenter à Petro Tim, dans les meilleurs termes, une

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proposition de contrat relatif aux blocs de Saint Louis Offshore profond et Cayar Offshore profond. A son tour, il a instruit le directeur de la promotion et le conseiller juridique de lui proposer un projet de contrat. Ledit projet a été soumis à Petro Tim qui l’a accepté. Selon lui, il n y a pas eu de négociation entre Petro Tim et la Commission d’évaluation car les instructions du Ministre ont consisté à lui présenter un contrat signé, elles n’ont pas consisté à entamer des négociations.

Interpellé sur la date du 17 janvier 2012 figurant sur le contrat comme date de signature, Monsieur MBODJI a soutenu avoir soumis le contrat au contreseing du Ministre courant mars 2012; ce qui peut être confirmé par le directeur de la promotion et le conseiller juridique de PETROSEN qui ont eu à rédiger le projet de convention et le projet de décret d’approbation ainsi que le rapport de présentation dudit décret.

III14 Les observations et commentaires des enquêteurs : L‘enquête a permis de faire les constatations suivantes :

• la manifestation d’intérêt formulée par Petro Tim n’a pas

été enregistrée dans le registre spécial des hydrocarbures comme le requiert la loi;

• la demande de Petro Tim ne comporte aucune des

mentions prescrites par l’article 8 du décret n°98-810 du 06 Octobre 1998 fixant les modalités d’application de la loi n°98-05 du 08 janvier 1998 portant Code pétrolier, notamment les exigences :

o de justifications additionnelles des capacités

techniques et financières de la personne

demanderesse ; o de communication des noms et adresses des

membres fondateurs de la société en formation.

A cet égard, si l’on se réfère au certificat d’immatriculation joint (annexe13), il y a lieu de souligner que la société Petro Tim a été immatriculée aux Îles Caïmans le 19 janvier 2012 sous le numéro 265741, donc postérieurement à l’octroi du permis. Pour cette raison, PETROSEN avait obligation de demander communication des noms et adresses des membres fondateurs de la société en formation. Cette formalité n’a pas été – accomplie.

• la mention dans le rapport de présentation du décret

portant approbation de la convention que Petro Tim est une filiale de PETRO ASIA n’est pas justifiée ; elle est mensongère. PETRO ASIA, s’il s’agit de PetroAsian

26

Energy Holdings Limited dénommé Petro ASIAN, répertorié dans le Hong Kong Stock Exchange le 13 Novembre 2002, n’a pas de filiale au nom de Petro Tim Limited; la récente immatriculation de Petro Tim aux Îles Caïmans laisse, du reste, perplexe sur ce point; la date du 17 Janvier 2012 figurant sur le contrat est antérieure, comme l’ont soutenu le directeur de la promotion et le conseiller juridique de PETROSEN, à leur saisine et à la rédaction du projet de décret portant approbation de la convention ainsi que le rapport de présentation dudit décret; l’avis conforme du ministre en charge des finances, requis par la loi, n’a pas été pris ;

En raison de ces manquements, qui sont de forme et de fonds, et nous référant aux dispositions de l’article 14 du décret n°98-810 sus visé, le ministre, qui a constaté que la demande de Petro Tim n’est pas complète, à défaut de la faire compléter, aurait dû la déclarer irrecevable.

La demande de permis présentée par Petro Tim n’était pas conforme aux exigences de l’article 8 du décret n°98-810. A cet égard, elle devrait être déclarée irrecevable en application de l’alinéa 2 de l’article 14 dudit décret.

L’irrecevabilité de la demande, que le ministre n’a pas fait rectifier, a constitué, dès l’entame de la procédure, une

raison suffisante de ne pas recevoir la demande de Petro Tim. Le fait de requérir, a posteriori, l’avis conforme du ministre chargé des finances pour se conformer à cette obligation n’a aucun effet sur l’irrecevabilité relevée.

Autre raison de déclarer irrecevable la demande de Petro Tim, du moins en ce qui concerne le Cayar Offshore profond, est l’accord intervenu entre Tullow et PETROSEN. En effet, il ressort des comptes rendus de séances des 21 et 22 Janvier 2010 de la Commission d’Evaluation des Offres (annexe 14), instituée auprès de PETROSEN par note de service n°00234 du 11 Mars 2008, que les négociations avec Tullow Sénégal Limited avaient abouti à un accord en ce qui concerne le Cayar Offshore profond. Les parties avaient prévu de procéder à sa signature en début Mars 2010.

Cette signature a-t-elle eu lieu ?

La lettre n°001639/ME/DHCD/ANT/cmb du 03 Mai 2010 (annexe 15) du Ministre de l’Energie adressée au Ministre de l’Economie et des Finances semble le confirmer.

En effet, par lettre sus visée, Monsieur Samuel Amète SARR, alors, Ministre de l’Energie, a rappelé à son homologue des finances les lettres des 04 Mars et 07 Avril 2010 par lesquelles il a sollicité son avis sur les projets de

contrat relatifs aux blocs de Louga et Cayar Offshore profond, négociés respectivement avec les compagnies pétrolières Blackstairs Energy Plc et Tullow Oil Plc, en association avec PETROSEN.

Par la même occasion, le Ministre en charge de l’Energie a fait part au Ministre de l’Economie et des Finances qu’aucune suite n’ayant été réservée aux demandes d’avis sus rappelées, se référant aux dispositions de l’article 12 du décret n°98-810 précité, il a décidé de considérer l’avis sollicité réputé conforme.

Le successeur de Monsieur Samuel Amète SARR au Département de l’Energie, Monsieur Karim WADE, a-t-il tenu compte de ces acquis ? Si oui, pourquoi n’y a-t-il pas eu de suite ?

Sur cette question, nous n’avons pas entendu M. WADE, absent du territoire national au moment où nous procédions à l’audition des parties à la procédure de conclusion de la convention et de délivrance du permis de recherche et de partage d’hydrocarbures.

Dans tous les cas, la convention demeure irrecevable pour inobservation des formalités prescrites par l’article 8 du décret n°98-810 portant application du Code pétrolier.

La demande introduite par Petro Tim ne peut donner lieu à conclusion de convention valide.

Est-ce pour cette raison que la demande de Petro Tim n’ait pas été soumise à la Commission d’évaluation des offres pour négociation avec les demandeurs et que, surtout, l’avis conforme du Ministre chargé des finances n’ait pas été requis comme il est exigé par la réglementation. Ce qui est de nature à vicier la convention qui n’a pas été conclue conformément aux règles de procédure fixées par la réglementation.

Ces irrégularités et l’irrecevabilité constatée, dès l’entame de la procédure, subsistant, la formalisation a postériori de l’avis conforme du Ministre de l’Economie et des Finances n’a aucune influence sur l’irrecevabilité de la demande.

PROPOSITION Présidence de la République

Retrait du permis de recherche dhydrocarbures accordé à Petro Tim pour les irrégularités entachant la validité de la convention conclue avec elle.

III2 SUR LE VERSEMENT DANS LE COMPTE DE PETROSEN DE PENALITES DUES A LETAT DU SENEGAL :

III21 Faits : l’Etat du Sénégal et Energy Africa ont conclu un contrat de recherche et de partage d’hydrocarbures relatif au bloc de Saint Louis Offshore peu profond.

Ayant racheté Africa Energy, la société Tullow Oil plc a été subrogé dans les droits et obligations de cette dernière. Ainsi, dans le cadre du contrat relatif au bloc de Saint Louis Offshore peu profond, la société Tullow Oil s’est trouvée tenue des engagements souscrits par Africa Energy.

Ce qui explique que par lettre n°00000628/MICITIE/DHCD/ant du 10 Février 2012, Monsieur Karim WADE, Ministre d’Etat, Ministre de la Coopération internationale, du Transport aérien, des Infrastructures et de l’Energie, a :

• d’une part, notifié à Monsieur Alan DOWOKPOR,

représentant de Tullow Oil, en ses bureaux à Dakar, Immeuble Tamaro, Rue Jules Ferry X Mohamed V, le retrait du permis de Saint Louis offshore peu profond pour inexécution de ses engagements contractuels;

• d’autre part, exigé le paiement de l’indemnité

compensatrice des travaux prévus au contrat et qui n’ont pas été réalisés.

Il a ordonné que le versement des sommes correspondantes soit effectué dans le compte bancaire n°FR76 30003 0301000078014144 42 de PETROSEN ouvert à la Société générale, Agence centrale, Paris, 29 Boulevard Haussman.

A la date du 13 Mars 2012, le compte ci-dessus référencé a été crédité du montant de l’indemnité réclamée, soit Trois millions de dollars US (annexe 16).

III22 Les griefs formulés contre PETROSEN : Tullow a déclaré avoir respecté ses engagements contractuels en acceptant de verser l’indemnité réclamée.

La société Tullow a reproché à PETROSEN la conclusion du contrat signé avec Petro Tim alors qu’elle avait trouvé un accord avec PETROSEN.

Au-delà du respect des engagements convenus lors de pourparlers, se pose la question de savoir, qui est le véritable créancier de l’indemnité versée à PETROSEN ? A-t-elle été versée à son véritable titulaire ? Si non, pourquoi ? Quel usage en a fait PETROSEN ?

III23 Justifications données par PETROSEN : PETROSEN a soutenu que les revenus pétroliers provenant des opérations de recherche et de partage d’hydrocarbures ont toujours bénéficié à PETROSEN. Elle a confirmé la réception

dans son compte bancaire du montant de l’indemnité payée par Tullow Oil. La totalité des sommes versées a été virée dans son compte bancaire ouvert dans les livres de la banque Atlantique sise au 40 Boulevard de la République (annexe 17) où elle disposait d’un dépôt à terme (DAT). PETROSEN, selon les déclarations de son Directeur, a cassé ce DAT et l’a augmenté du montant de l’indemnité pour acheter des obligations émises par l’Etat.

III2-4 Observations et commentaires des enquêteurs :

Aux termes des dispositions du Code pétrolier et de la Convention, l’Etat et PETROSEN sont deux personnes distinctes.

Selon les dispositions des articles 3 et 4 du Code pétrolier, l’Etat exerce sur l’ensemble du territoire de la République des droits souverains aux fins de la prospection, de la recherche, de l’exploitation et du transport des hydrocarbures. Il est propriétaire de tous les gisements ou accumulations naturelles d’hydrocarbures existant dans le sous sol de la République du Sénégal.

L’Etat peut se réserver le droit d’entreprendre des opérations pétrolières par l’intermédiaire d’une société d’Etat.

PETROSEN, définie comme Société des Pétroles du Sénégal, est une société d’Etat, c’est-à-dire, une entreprise constituée

33

par l’Etat en vue de réaliser des opérations pétrolières sous la forme d’une société nationale ou d’une société à participation publique majoritaire.

Elle a donc une personnalité distincte de celle de l’Etat.

Dans le cadre de la convention de recherche et de partage d’hydrocarbures conclue entre l’Etat et Africa Energy aux droits duquel Tullow Oil plc a été subrogé, PETROSEN est associée à Tullow Oil et est, au même titre que cette dernière, cocontractant de l’Etat, même si elle est déchargée de certaines obligations pesant sur son associé.

La convention signée entre les parties a fixé, conformément à l’article 18 du Code pétrolier, un programme minimum de travaux de recherche sur lequel s’est engagé Africa Energy.

Conformément aux dispositions de l’article 19 du Code pétrolier, la Convention stipule que si le titulaire du permis n’a pas rempli ses obligations relatives aux travaux prévus, en application de l’article 18 du code, il doit verser à l’Etat l’indemnité convenue.

Aussi, en cas d’expiration ou de résiliation de la convention, dès lors que les travaux prévus à la convention n’ont pas été réalisés, conformément à l’article 19 du Code pétrolier, l’indemnité compensatrice prévue par la convention est

versée à l’Etat qui, en sa qualité de propriétaire du sol, dispose, d’un droit de reprise sur les installations et équipements relatifs aux opérations pétrolières sur la surface abandonnée.

Par ailleurs, l’indemnité compensatrice ne doit pas être confondue avec le loyer superficiel annuel exigible à compter de la signature de la convention et dont le montant et les modalités de recouvrement sont déterminés dans la convention. Ce loyer est effectivement laissé à la disposition de PETROSEN qui assure la promotion du bassin sédimentaire sénégalais.

Pour toutes ces raisons et celles liées au caractère compensatoire de l’indemnité, réclamée sur le fondement des articles 18 et 19 du Code pétrolier, celle-ci est acquise à l’Etat.

Le fait pour PETROSEN d’avoir pris possession des fonds versés en compensation des travaux non réalisés et de les avoir utilisés à des fins personnelles, constitue des faits de soustraction de deniers au préjudice de l’Etat. Cette soustraction a été rendue possible par la décision du Ministre en charge du secteur pétrolier, qui a expressément prescrit son versement dans le compte bancaire de PETROSEN.

Or, le fait de soustraire des deniers au préjudice de l’Etat est susceptible de constituer le délit de détournement de deniers publics. Ce délit pourrait être reproché au ministre même si, éventuellement, il n’en aurait pas tiré directement un bénéfice personnel.

PETROSEN, qui a reçu la totalité des sommes ainsi soustraites et qui en a fait un usage personnel en achetant des obligations émises par l’Etat, peut être atteint du délit de recel de deniers publics.

L’appropriation par PETROSEN de deniers dus à l’Etat étant irrégulière, ceux-ci doivent être restitués, sans préjudice des intérêts générés par son placement.

PROPOSITION 1 Ministre de lEconomie et des Finances

Initier les procédures appropriées pour assurer le reversement du montant total de lindemnité versée dans le compte de PETROSEN sans préjudice des produits et intérêts nérés en compensation des travaux convenus non réalisés.

PROPOSITION 2

Ministre de la Justice, Garde des Sceaux

36

Faire ouvrir éventuellement une information judiciaire contre MM. Karim WADE et Ibrahima MBODJ pour avoir, contre le premier soustrait de leur destination des deniers publics, contre le second, lutilisation des fonds ainsi soustraits à des fins autres que celles décidées par lEtat.

III3 Sur la demande de paiement de bonus de signature formulée par le Directeur de PETROSEN :

III.3.1 Les faits : En réponse à la demande de permis de recherche relatif aux blocs de Saint Louis Offshore profond, Cayar Offshore profond, Saint Louis Shallow et Cayar Shallow, par message électronique daté du 19 janvier 2012, adressée à Awa NDONGO, représentante à Dakar de Tullow, Monsieur Ibrahima MBODJI, Directeur général de PETROSEN,

a:

• d’une part, signifié à Tullow Oil Sénégal l’indisponibilité

de Cayar Shallow qui est sous contrat;

• d’autre part, pour ce qui concerne les trois autres blocs

sollicités, exigé, à titre de bonus de signature, le paiement de la somme d’un million cinq cent mille dollars US pour chaque bloc.

37

III32 Les griefs formulés contre Ibrahima MBODJI: Tullow a reproché à Ibrahima MBODJI la réclamation de bonus de signature alors qu’il n’est sans ignorer que les blocs concernés ont été attribués à Petro Tim Limited. Tullow a soupçonné M. BODJI de tentative d’escroquerie.

III33 Les justifications données par le mis en cause : Sur ces allégations, Monsieur Ibrahima MBODJI, Directeur de PETROSEN, a reconnu avoir effectivement demandé à Tullow d’accepter d’augmenter son offre globale à raison d’un million cinq cent mille par bloc.

Mais, soutient-il, sa demande a été motivée par la volonté de rendre attractive l’offre de Tullow qui n’était pas seul à solliciter les blocs concernés.

Par ailleurs, il a soutenu que la demande de paiement de bonus, qui n’est pas, du reste, interdite par la loi, a été présentée avant la conclusion du contrat signé avec Petro Tim Limited.

Sur la date du 17 janvier 2012, comme date de signature et d’approbation de la convention signée avec Petro Tim, il a affirmé et persisté dans ses déclarations que la convention conclue avec Petro Tim a été transmise au ministre pour contreseing courant mars 2012. La convention lui est revenue

38

du ministère comportant une date antérieure à sa conclusion et à sa transmission pour son contreseing.

A cet égard, il a fait appel au témoignage du directeur de la promotion et du conseiller juridique de PETROSEN, tous deux, rédacteurs de la convention, du décret portant approbation de ladite convention ainsi que le rapport de présentation dudit décret.

III-3-4 Observations et commentaires des enquêteurs : L’explication fournie par M. MBODJI, pour justifier sa demande de paiement de bonus de signature, ne peut pas prospérer.

En effet, les contrats de recherche pétrolière ont pour particularité l’aléa. La probabilité est faible que dans les pays où aucune découverte n’a été déjà enregistrée que des gisements soient découverts.

Si le paiement de bonus de signature est concevable et de pratique courante dans les pays où des gisements d’hydrocarbures ont été découverts, il est inapproprié et improductif dans les pays où l’aléa est plus élevé.

Le Sénégal, qui fait partie des pays à fort aléa, dans le but de rendre compétitif son bassin sédimentaire, a décidé, en 1998, « d’offrir aux acteurs potentiels de l’industrie pétrolière, des conditions attrayantes et susceptibles de favoriser le

39

développement des investissements pétroliers dexploration ou de production sur le territoire national » (Extrait exposé des motifs de la loi n°98-05 du 08 janvier 1998 portant Code pétrolier).

Ainsi, à l’occasion de l’adoption de la loi n°98-05 du 08 janvier 1998 portant Code pétrolier, le législateur a décidé la suppression du bonus de signature qui pouvait être exigé sous le régime précédent.

Dans ce contexte, réclamer un bonus de signature, quelle qu’en soit la motivation, est contraire à la loi et à la politique mise en place pour attirer des investisseurs potentiels de l’industrie pétrolière. La suppression du bonus de signature par la loi n°98-05 du 08 janvier 1998 portant Code pétrolier interdit qu’il soit demandé.

La seule manière de rendre attractive l’offre de Tullow, aurait été de lui suggérer d’augmenter le volume des travaux proposés. Une telle demande aurait eu le mérite d’être en rapport avec le critère lié à l’importance des investissements proposés par le demandeur.

Le fait pour Monsieur Ibrahima MBODJI de solliciter un bonus de signature est contraire aux prescriptions de la loi et tombe sous le coup de dispositions pénales.

En effet, l’article 157 du Code pénal prévoit sous la qualification de concussion le fait pour tous fonctionnaires ou officiers publics, tous percepteurs des droits, contributions ou deniers publics, leurs commis ou préposés, d’avoir reçu, exigé ou ordonné de percevoir ce qu’ils savaient n’être pas dû ou excéder ce qui était dû pour droits, taxes, contributions, deniers ou pour salaires ou traitements. Seront punis des mêmes peines :

• tous détenteurs de l’autorité publique, qui ordonneront

des contributions directes ou indirectes autres que

celles autorisées par la loi;

• tous fonctionnaires, agents ou employés qui en

établiront les rôles ou en feront le recouvrement.

La tentative du délit est punie comme le délit lui-même.

PROPOSITION Ministre de la Justice, Garde des Seaux

Faire ouvrir éventuellement une information judiciaire contre Ibrahima MBODJ pour avoir exigé la perception de droits quil savait nêtre pas dus.

41

IV – CONCLUSIONS DES ENQUETEURS

Au terme de la présente enquête, Nous, Gallo SAMB et Oumar SARR, concluons aux manquements ci-dessous indiqués.

IV1 Manquements constatés :

1. absence ou tenue irrégulière du registre des

hydrocarbures : fait imputable à la fois au ministre en charge du secteur pétrolier et au directeur des hydrocarbures;

2. délivrance de permis de recherche et de partage

d’hydrocarbures en violation des règles de procédure fixées par la réglementation relatives :

• aux conditions de recevabilité de la demande de

délivrance de permis de recherche et de partage d’hydrocarbures : fait imputable au ministre responsable de la conduite de la procédure de conclusion de la convention de recherche ;

• à l’obligation de procéder à des négociations

avant toute attribution : fait imputable au directeur de PETROSEN ;

2

• de l’obligation de requérir l’avis conforme du Ministre

chargé des finances : fait imputable au ministre en charge du secteur pétrolier.

3. absence de prise de garantie de bonne exécution après

conclusion de la convention : fait imputable au Directeur de PETROSEN;

4. versement irrégulier de deniers dus à l’Etat dans le

compte de PETROSEN qui en a fait un usage personnel : faits imputables au ministre Karim WADE et Ibrahima MBODJI, directeur de PETROSEN;

5. demande de paiement de deniers non dus : fait

imputable au directeur de PETROSEN;

6. La soumission précipitée, surprenante, improductive et

risquée de la convention signée à nouveau avec Petro Tim par l’actuel Ministre en charge du secteur pétrolier à l’approbation du Président de la République, alors que celle-ci, dans les mêmes termes, avait été conclue et contresignée par son prédécesseur qui l’avait fait approuver le 17 janvier 2012 par le Président de la République en exercice.

Son attitude est surprenante, car la présente enquête a été ordonnée par le Président de la République sa

saisine. Il n’a pas attendu les résultats l’enquête, pour savoir s’il pouvait ignorer la convention approuvée le 17 Janvier 2012 ou négocier une nouvelle convention.

Cette nouvelle approbation est improductive parce qu’elle ne donne lieu à aucun versement de fonds ou gains immédiats pour l’Etat, justifiant une telle précipitation. En effet, les gains qui pourraient en résulter, surtout pour l’Etat, à savoir les travaux prévus au contrat ou l’indemnité compensatrice en cas d’inexécution partielle ou totale desdits travaux, ne seront exigibles qu’au terme du contrat pour pouvoir constater la réalisation ou non des travaux et/ou exiger, en contrepartie des travaux non réalisés, l’indemnité compensatoire.

il n y avait aucune urgence à précipiter une nouvelle signature et approbation se superposant à celles effectuées le 17 janvier 2012 par le ministre et le président de la République en exercice à l’époque.

Elle est également risquée, car la convention de recherche et de partage d’hydrocarbures signée avec Petro Tim n’est pas à l’abri d’un recours en justice pour les irrégularités qui entachent sa validité. Sur ce point, Tullow Sénégal Limited qui est à la base des faits dénoncés trouver un moyen de contester par les voies

légales la régularité du permis obtenu sur la base d’un contrat à l’origine vicié.

Au regard de ces constatations, nous formulons les propositions qui suivent.

IV-2 Propositions :

Proposition n°1- Ministre en

pétrolier :

charge du secteur

Mise en place d’un registre spécial des hydrocarbures côté et paraphé par le Ministre en charge du secteur pétrolier et tenu par le Directeur des hydrocarbures,

conformément aux dispositions de la loi ;

• Proposition n°2 – Présidence de la République :

Retrait des permis octroyés à Petro Tim en raison des irrégularités qui entachent la validité de la convention signée avec Petro Tim qui en est le substrat.

• Proposition n°3 – Ministre de la Justice, Garde des

Sceaux :

Saisir éventuellement la Justice des faits de :

45

✓ soustraction de deniers publics (l’indemnité

compensatrice des travaux non réalisés au préjudice de l’état) au préjudice de l’Etat;

✓ utilisation à l’insu de l’Etat des fonds ainsi soustraits

à des fins autres que celles décidées par celui-ci;

✓ tentative de perception de droits non dus

(demande de paiement d’un million cinq cent mille (1500 000) dollars US par bloc à titre de bonus de signature alors que la loi a proscrit sa perception).

Fait à Dakar, le 21 Septembre 2012

Gallo SAMBE

Oumar SARR

Inspecteur Général dEtat

Inspecteur Général dEtat







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